De son vrai nom Vami Bi Koué Théodore, cet homme qui était surnommé Charly Watta était un personnage très redouté dans les rues d’Abidjan. Son nom faisait trembler et son sens développé du combat faisait fuir tout adversaire. Nul n’osait croiser son chemin tant il s’était forgé une image de guerrier redoutable mais qui savait également être empathique.
Charly Watta s’est fait un nom et a laissé pleins d’histoires qui continuent d’alimenter les discussions. Certaines personnes notamment des « Ziguéhis » s’ apparentent à son mouvement en tant que « Wattaman ». Il était pour eux une source d’inspiration et une personne dotée de talents particuliers. Tandis que d’autres le considérait comme un fétichiste prêt à tout afin de demeurer invincible.
Qui était réellement Charly Watta ?
Né le 30 Décembre à Vavoua, ville située au centre-ouest de la Côte d’Ivoire, Vami Bi Koué Théodore se faisait déjà surnommé « petit Charly » en référence à son frère aîné. En effet, son grand frère, grand adepte des arts martiaux à l’époque l’emmenait à ses entrainements de Karaté et l’initia aux techniques de combat. Sa pratique continuelle et passionnante du Karaté lui a valu d’être distingué en tant que l’un des meilleurs combattant et bagarreur de toute la ville. Son meilleur ami va finalement lui donner le surnom de « Watta » d’ou aujourd’hui « Charly Watta » .

Dans son adolescence, il a fréquenté à Vavoua jusqu’à l’obtention de CEP avant de se rendre à Yamoussoukro puis à Abidjan.Mais tout n’était pas si rose. Il s’embrouillait constamment avec ses camarades et finit par être renvoyé de l’école à la classe de 6e au CEG de Vavoua. Avec quelques amis du quartier dont Siaka Danger, Douguissa, Santana , ils créent un clan pour régler leur compte avec d’autres jeunes de la ville. Durant son adolescence, CharlY Watta passait la majeure partie de son temps dans la rue. Son ami, aussi exclu de l’école, l’accompagnait. Ils erraient avec leur mentor, « vieux père » Siaka Danger. Un jour, la grande sœur de CharlY, consciente de son potentiel intellectuel, intervint. Elle convainquit leur grand frère d’envoyer Charly à Abidjan. Ainsi, Charly put poursuivre ses études.
Charly se retrouva à Abidjan et s’inscrivit au collège Voltaire à Treichville. Là-bas, il rencontra des camarades comme Gor la Montagne, Kam’so et Chikito. Ils formèrent ensemble un petit groupe nommé Mapléss. Chaque matin, à 9h45, ses amis venaient le chercher à l’école.
Malheureusement, le comportement turbulent de Charly à Voltaire lui causa des ennuis. Il obtint une mauvaise note en Conduite et fut renvoyé en classe de 4ème. Charly rejoignit alors son frère, professeur au Cafop de Katiola. L’école finit par rejeter Charly malgré ses efforts et une année scolaire globalement réussie. Ils lui demandèrent de changer d’établissement.
D’où est venue la notoriété de Charly Watta ?
Il répondait généralement que ceci était inné. Il ajoutait aussi qu’il s’était fait remarqué à travers ses nombreux échanges belliqueux. Charly n’hésitait pas à effectuer des échanges de coups avec tous ceux qui se mettaient sur son chemin que ce soit dans le quartier, dans les soirées dansantes où encore dans les booms. Le plus étonnant, il était petit de forme mais se battait t un lion.
Quand on lui demandait pourquoi il aimait se battre et pourquoi il n’arrivait pas à changer sa conduite il répondait : « Je pense que c’est inné. C’est la seule explication que je peux donner, parce que je n’arrive pas expliquer ce qui se passait en moi. C’était vraiment plus fort que moi »
Les nombreux périples du loubard Ivoirien
Charly Watta avait un oncle qui travaillait au peloton mobile de la ville. Cependant, il fut de nouveau renvoyé de l’école après une bagarre au cours de laquelle il arracha une dent à un jeune habitant chez le préfet. Face à cette situation, son oncle, déçu, lui paya le transport pour qu’il quitte la ville, car Charly était recherché en raison d’un certificat médical déposé contre lui par le jeune blessé.

Charly se réfugia chez des amis pendant un certain temps, continuant à se bagarrer et voyageant entre Man et Biankouma. Suite à ce périple, sa grande sœur, découragée par son comportement, l’envoya à Vavoua. Là-bas, Charly vivait dans un environnement de totale liberté, sa mère étant absente et son père souvent au champ. Livré à lui-même, il ne cessait de se bagarrer, incapable de se contrôler.
Finalement, en 1994, Charlie quitta Vavoua pour se rendre à Yamoussoukro.
Par la suite, Charly Watta rencontra Ismaël Isaac. Des amis avaient informé Ismaël de la réputation de Charlie à l’intérieur du pays. Ismaël proposa à Charlie de l’accompagner lors de ses tournées car séduit par cette renommée.
Charly devint alors le bodyguard d’Ismaël Isaac. Ismaël joua un rôle déterminant dans la carrière musicale de Charly. Il réussit à sortir un album grâce à lui .
La réalité de vie de Charly Watta : vérités et rumeurs
Les légendes entourant Charly Watta sont nombreuses, mais elles sont souvent loin de la réalité. On raconte qu’il aurait sacrifié ses parties intimes pour obtenir des pouvoirs. Charly a même un enfant, preuve qu’il n’a rien sacrifié de tel.
L’histoire de Charly est marquée par celle de son oncle, Sui Bi Kouè, un grand bagarreur qui s’était même battu avec le père de Charly au début de sa relation avec sa mère, par jalousie. La mère de Charly Watta était une princesse car son grand-père était le chef des Gouro de Vavoua. Cet oncle avait demandé à la mère de Charly d’appeler son fils à venir Kouè et avait même craché sur son ventre. Peu de temps après la naissance de Charly, son oncle est décédé, et les gens disaient qu’il s’était réincarné en Charly. De là à dire que Charly avait fait des fétiches, ce ne sont que des ragots.
Charly possède une souplesse phénoménale et un pied gauche redoutable en bagarre, souvent comparé à un pied d’éléphant. Cette capacité est innée et dépasse sa compréhension. Il sait que son pied est dangereux, mais il ignore pourquoi.
Dans le mouvement Ziguéhi, il est courant de pratiquer le fétichisme pour se protéger, car il y a beaucoup de jaloux et d’aigris. Chacun se protège à sa manière, certains vont à l’église, d’autres utilisent des talismans. La rue est imprévisible, et il est essentiel de se protéger. Le mouvement Ziguéhi a évolué, passant de simples bagarres à des affrontements de groupe avec des machettes.
Ces réponses ont été données par Charly Watta lui-même, éclairant ainsi les mythes et réalités qui entourent sa vie.
Le combat le plus mémorable de Charly Watta
Charly Watta affirme n’avoir jamais connu la défaite, ce qui est pour lui une bénédiction divine. Il insiste sur le fait qu’il n’a jamais été battu. Cependant, une bagarre à San-Pédro, entre 1999 et 2000, reste gravée dans sa mémoire.
Un jour, Charly se rendit dans un maquis pour attendre un grand frère, lieutenant des douanes. C’est là qu’il rencontra un sourd-muet qu’il ne connaissait pas. Entre « Ziguéhi », il n’y avait pas de problèmes. Le sourd-muet alla s’asseoir dans un coin, tandis que Charly était assis dans un autre.
Plus tard, Charly se rendit en boîte de nuit et y retrouva le sourd-muet, qui dansait très bien. Après avoir salué des amis libanais, Charly se rendit aux toilettes. À sa grande surprise, il entendit un grand bruit derrière lui. En se retournant, il vit le sourd-muet, très grand, qui lui faisait des gestes menaçants. Charly ne comprenait pas pourquoi. Quelques instants plus tard, des amis libanais forcèrent la porte et intervinrent pour les calmer. Charly, ne connaissait pas cet homme et considérait cette situation comme une provocation inutile. Il lança des coups de pied dans tous les sens, mais les gens le calmèrent et il sortit.
Le sourd-muet se posta ensuite devant la porte pour empêcher Charly de retourner dans la boîte. Charly le poussa, ainsi que le portier, et entra. À l’intérieur, le sourd-muet revint, mais cette fois, il ne s’occupait pas de Charly et dansait comme si de rien n’était. Charly sortit et se rendit au Triangle, chez Bob. Vers 4 heures du matin, le sourd-muet arriva et annonça à tout le monde qu’il allait frapper Charly.
Ils se bagarrèrent, mais le sourd-muet était très résistant. C’est le seul combat où Charly sentit vraiment son adversaire. Ils se battirent longtemps, car le sourd-muet voulait absolument se battre contre Charly. Il prit Charly par les reins, mais Charly lui donna un coup de tête sans le mettre K.O. Charly était dépassé, mais le sourd-muet était ensanglanté. Finalement, on transporta le sourd-muet à l’hôpital après que Charly l’eut terrassé.
La dernière bagarre de Charly Watta
Elle remonte en 2008. Cependant, il continuait de s’entraîner rigoureusement. Il ne buvait pas, ne fumait pas, mais conserve les mêmes réflexes et les mêmes coups de pied qu’avant. Toutefois, il avait modéré son comportement, car il avait un enfant. Il souhaitait désormais éviter les problèmes pour que son fils ne le considère pas comme un loubard.
Charly avait fait de la prison à Daloa et à Séguéla. À Daloa, il fut condamné à deux mois de prison pour coups et blessures volontaires, et à quatre mois à Séguéla pour les mêmes raisons. Cependant, il était mineur à cette époque.
Les relations de Charly Watta avec John Pololo
Charly Watta nie toute rivalité avec John Pololo, un grand nom du milieu « Ziguéhi », le considérant comme un grand frère. Admirateur de John dès son jeune âge, Charly, tout comme John, pratiquait le taekwondo. Après sa sortie de prison, John travailla comme portier dans une boîte de nuit et se lia d’amitié avec Charly. Avant sa mort, John et Charly étaient en contact régulier. John révéla même à Charly qu’il prévoyait de mourir par balle, une prédiction qui se réalisa peu après.
Les circonstances de la mort de John Pololo furent rapportées par Jean Jacques, lieutenant de John. John avait acheté un bracelet en or à Abobo, mais après avoir constaté qu’il avait noirci, il demanda des explications au bijoutier, ce qui provoqua des tensions. Bien que John ait reçu une compensation financière des riverains, ces derniers alertèrent le camp commando, ce qui aboutit à l’arrestation de John.
Quel héritage Charly a-t-il laissé derrière lui ?
Charly a un fils qui lui ressemble beaucoup selon lui car étant également bagarreur et impulsif. Charly souhaite que son fils ne suive pas ses traces de loubard et se distancie parfois de lui pour éviter les questions sur son passé. Son fils va à l’école et joue au football, contrairement aux souhaits de sa mère qui aurait préféré qu’il pratique le karaté. Charly remercie Dieu de ne jamais avoir tué quelqu’un et prie pour que son fils mène une vie différente de la sienne.
La légende des rues ivoiriennes : Même après sa disparition Charly Watta suscite toujours admiration et crainte

Depuis les années 70, Charly était un pionnier du mouvement « Ziguéhi » qui rassemblait des jeunes. Il s’était surtout fait connaître de la génération actuelle grâce à son featuring « Faut m’appeler » avec le groupe togolais Toofan. Ce morceau a marqué les esprits et a permis à de nombreux jeunes de découvrir son talent.
Depuis sa mort, plusieurs artistes, dont le groupe Toofan et Julien Goualo, ont exprimé leur peine sur les réseaux sociaux. Ils ont salué la mémoire de cet ex-ziguéhi qui s’était reconverti en chanteur avec succès. La disparition de Charly Watta a laissé une grande tristesse dans le milieu des « Ziguéhi »et chez ses nombreux fans.