L’Irak veut baisser l’âge légal de consentement pour les filles à seulement neuf ans. Il s’agit d’un projet de loi controversé qui a été proposé par des partis chiites ultra-conservateurs en Irak. Ce texte, s’il est adopté, permettrait également aux hommes de se marier avec de très jeunes filles. Cela retirerait également aux femmes des droits fondamentaux en matière de divorce, de garde d’enfants et d’héritage. Cette mesure, en préparation au Parlement irakien, serait un coup dur pour les droits des femmes et des filles dans le pays.
1. La remise en question de la loi sur le statut personnel
Le Parlement irakien, dominé par une coalition de partis chiites conservateurs, envisage une modification de la loi de 1959 sur le statut personnel. Il s’agit de l’une des législations les plus progressistes du Moyen-Orient. Ce texte, s’il est adopté, ancrerait une interprétation stricte de la loi islamique sous prétexte de « protéger les jeunes filles des relations immorales ». Le projet inclut une réduction de l’âge minimum du mariage. Aussi, il prévoit la suppression de nombreux droits accordés aux femmes, comme le divorce ou la garde d’enfants.
2. Un contexte politique favorable aux réformes ultra-conservatrices ?
Ce n’est pas la première tentative de modification de la loi sur le statut personnel. Une modification avait déjà été envisagée en 2014 et 2017, mais elle fut bloquée par les protestations des militantes irakiennes.
Aujourd’hui, le contexte politique irakien a changé. La coalition chiite ultra-conservatrice bénéficie d’une majorité parlementaire significative, facilitant l’adoption de cette réforme. Selon certains chercheurs, les partis chiites islamistes cherchent à renforcer leur influence en Irak en mettant en avant la dimension religieuse.
3. Une menace pour l’unité sociale et un retour aux identités sectaires ?
Certaines personnes pensent que l’adoption de ce texte pourrait aggraver les divisions sectaires au sein de la société irakienne. Elle soutiennent que de nombreux Irakiens préfèrent se définir par leur citoyenneté plutôt que par leur appartenance religieuse. Des spécialistes avertissent également que cette modification pourrait ramener la société irakienne à des identités religieuses. Un retour en arrière dans un pays marqué par des décennies de conflits et de divisions.
4. Quelles conséquences pour les jeunes filles irakiennes et leurs droits ?
Les défenseurs des droits des femmes mettent en garde contre les effets désastreux de ce projet de loi. Avec un taux de mariage précoce déjà élevé (28 % des femmes mariées avant 18 ans selon l’UNICEF), les modifications proposées risquent de légitimer les mariages précoces. Ce qui aggraverait les risques de violences sexuelles et physiques pour les jeunes filles.
Par ailleurs, la modification légitimerait les mariages religieux avec des mineures. En conséquence, cela exposerait les jeunes filles, notamment à des risques élevés de violences . Athraa Al-Hassan, juriste spécialisée en droits humains, redoute que l’Irak ne glisse vers le Wilayat al-Faqih. Un s’agit d’un modèle de gouvernance plaçant la loi religieuse au-dessus de l’État, à l’instar des régimes en Iran et en Afghanistan.
Cette initiative ferait partie d’une série de mesures visant à restreindre les droits des femmes en Irak. C’est le cas la criminalisation des relations homosexuelles en avril, assortie d’une peine de 15 ans de prison. Il y a également la substitution obligatoire du terme « homosexualité » par « déviance sexuelle » dans les médias.
5. La mobilisation des militantes irakiennes contre le projet de loi
En octobre, des protestations ont éclaté à Bagdad et dans d’autres villes pour dénoncer cette proposition de loi. Le Coalition 188, un groupe de femmes activistes irakiennes, s’oppose fermement à ces amendements. De leur côté, les partisans de cette nouvelle loi accusent les opposants de promouvoir la « décadence morale » et de « suivre les agendas occidentaux. »
Athraa Al-Hassan, l’une des figures du mouvement féministe en Irak, décrit cette réforme comme « dangereuse » et une violation de la Constitution irakienne. Selon elle, l’Irak, pays pionnier pour les droits des femmes dans le monde arabe, doit aspirer à progresser, et non à régresser.